Règles et démarches d’indemnisation en cas d’accident du travail ou de trajet
Le régime d’indemnisation des accidents du travail en France est conçu pour assurer une réparation rapide et standardisée des victimes, mais il ne permet pas une indemnisation complète de tous les préjudices subis.
Pour les victimes, il est souvent nécessaire de recourir à des actions juridiques complémentaires, notamment en cas de faute inexcusable, afin d'obtenir une compensation plus juste et intégrale de leurs préjudices.
Pour qu’un accident soit reconnu comme accident du travail, trois critères doivent être remplis :
- Cadre professionnel : l'accident doit s'être produit sur le lieu de travail ou pendant une activité liée au travail.
- Origine soudaine et fortuite : l'accident doit être un événement imprévu.
- Lésions corporelles ou psychiques : l'accident doit avoir causé des dommages physiques ou psychologiques.
1. Déclaration et prise en charge des accidents du travail ou de trajet
- Déclaration par le salarié : L'accident doit être déclaré à l'employeur dans les 24 heures, sauf cas de force majeure ou motifs légitimes empêchant cette déclaration.
- Déclaration par l’employeur : L’employeur doit déclarer l’accident à la Caisse Primaire d’Assurance Maladie (CPAM) dans un délai de 48 heures (hors week-ends et jours fériés) et peut émettre des réserves dans les 10 jours suivant cette déclaration.
- Délai de décision de la CPAM : La CPAM dispose de 30 jours à compter de la réception de la déclaration et du certificat médical pour informer le salarié de sa décision sur la reconnaissance du caractère professionnel de l'accident.
2. L’indemnisation automatique des accidents du travail
Prise en charge des frais médicaux
- Le salarié doit consulter un médecin qui établira un certificat médical décrivant les lésions. Ce certificat est transmis à la CPAM et au salarié.
- L'employeur doit remettre une feuille d’accident du travail au salarié, qui permet la prise en charge à 100 % des soins liés à l’accident sans avance de frais pendant toute la durée des traitements.
Les indemnités « automatiques » relatives à un accident du travail
Si un arrêt de travail est prescrit, trois types d’indemnités peuvent être versées :
- Indemnités journalières (CPAM) : Calculées sur la base du salaire journalier. Les 28 premiers jours, l’indemnité est de 60 % du salaire journalier de base, puis 80 % à partir du 29e jour. Ces indemnités sont versées sans délai de carence.
- Indemnité complémentaire (employeur) : Sous certaines conditions (ancienneté d’un an, absence justifiée, prise en charge par la Sécurité sociale, soins reçus en France ou dans l’EEE, et non applicable aux salariés spécifiques comme les saisonniers), l'employeur verse un complément d’indemnité.
- Rente d’incapacité permanente : Versée en cas de séquelles entraînant une incapacité permanente, le montant dépend du taux d’incapacité fixé par un médecin-conseil de la Sécurité sociale.
Elle est versée sous forme de rente ou de capital si le taux d’incapacité est inférieur à 10 %.
Le salarié peut contester le taux d’incapacité retenu par le médecin-conseil de la Sécurité sociale dans le cadre d’un recours devant le Pôle social du Tribunal judiciaire compétent après saisine de la Commission médicale de recours amiable, dans les deux mois suivant la notification du taux d’incapacité.
Les limites de l’indemnisation des accidents du travail selon le Code de la Sécurité Sociale
- Indemnisation forfaitaire : Le système est basé sur une indemnisation forfaitaire qui comprend des indemnités journalières pendant l’arrêt de travail et, en cas d’incapacité permanente, une rente calculée selon le taux d’incapacité de la victime.
Cette rente est déterminée en fonction du salaire de référence et du taux d’incapacité, sans tenir compte de l’ensemble des préjudices personnels.
- Absence de réparation intégrale : Contrairement à une réparation intégrale qui vise à compenser l'ensemble des préjudices subis par la victime (physiques, moraux, économiques, etc.), le système de la Sécurité Sociale se limite à une compensation partielle, souvent insuffisante pour couvrir les pertes réelles de la victime.
Par exemple, les préjudices d’agrément, esthétiques, ou encore les souffrances morales ne sont pas indemnisés de manière adéquate dans ce cadre.
- Exclusion de certains préjudices personnels : La rente versée par la Sécurité Sociale est destinée à compenser principalement les pertes de gains professionnels et l’incidence professionnelle de l’incapacité.
Les autres préjudices comme le préjudice sexuel, le déficit fonctionnel temporaire, ou encore le recours à une tierce personne ne sont pas couverts par cette indemnisation.
Notre cabinet vous accompagne dans vos démarches pour contester le taux d’incapacité retenu par la sécurité sociale ou la notification de consolidation sans séquelles.
Nous vous assistons également afin d’envisager les possibilités d’indemnisations complémentaires (recours contre les tiers responsables non salarié de l’entreprise ou recours pour faute inexcusable de l’employeur).
3. La faute inexcusable de l’employeur
Le Code de la Sécurité Sociale prévoit une indemnisation forfaitaire pour les victimes d’accidents du travail ou de maladies professionnelles, mais cette indemnisation est limitée et ne couvre pas tous les préjudices subis par la victime.
Contrairement à la réparation intégrale prévue par le droit commun, la réparation prévue par le Code de la Sécurité Sociale est encadrée par des barèmes et plafonds spécifiques, ce qui limite la compensation des préjudices.
La reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur permet à la victime d’obtenir une réparation complémentaire pour certains préjudices non couverts par la rente forfaitaire.
Cette possibilité offre une compensation pour des souffrances physiques et morales, des préjudices esthétiques et d’agrément, ainsi que pour la perte de chance de promotion professionnelle.
Cependant, cette réparation complémentaire nécessite la reconnaissance juridique de la faute inexcusable, ce qui peut être un processus long et complexe.
Définition de la faute inexcusable de l’employeur
L’employeur commet une faute inexcusable lorsqu’il a exposé son salarié à un danger dont il avait ou aurait dû avoir conscience et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver.
La faute inexcusable est définie comme le manquement grave à l’obligation de sécurité de résultat, lorsque l’employeur connaissait ou aurait dû connaître le danger sans prendre les mesures nécessaires (Cour de Cassation, Assemblée plénière, 24/06/2005).
Depuis la loi n°87-39 du 27 janvier 1987, l’employeur peut souscrire une assurance contre les conséquences financières de sa faute inexcusable. Avant cette date, l’assurance n’était possible que pour les fautes des substituts ou était interdite.
Procédure de reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur
L’article L.452-1 du Code de la sécurité sociale dispose que la demande en reconnaissance de la faute inexcusable est formée par la victime d'un accident du travail, d'une maladie professionnelle ou d'une rechute, ou par ses ayants droit, à l'encontre de l'employeur.
Pour engager une procédure en reconnaissance d’une faute inexcusable de son employeur, il faut d’abord avoir été reconnue victime d’un accident du travail/maladie professionnelle par la CPAM.
Selon l’article L.452-4 du Code de la sécurité sociale, le salarié victime ou ses ayants droits peuvent obtenir la reconnaissance d’une faute inexcusable de l’employeur, soit par la voie d’une procédure amiable/gracieuse, soit par la voie d’une procédure contentieuse.
Après introduction de la demande auprès de la Caisse primaire d’assurance maladie, une procédure amiable en découlera : il s’agit de la procédure de conciliation à laquelle l’employeur sera présent.
A défaut de conciliation, l’action sera amenée devant le Pôle social du Tribunal judiciaire.
Dans l’hypothèse d’une reconnaissance de la faute inexcusable, un expert médical sera désigné pour évaluer précisément les préjudices subis par le salarié.
Ce rapport sert de base pour chiffrer les indemnisations demandées.
En cas de reconnaissance de faute, la CPAM avance les sommes dues au salarié et se retourne ensuite contre l’employeur.
Cette reconnaissance permet également de réclamer des indemnisations pour des préjudices non couverts par la rente, tels que la souffrance morale, les préjudices esthétiques, ou l’aide d’une tierce personne.
Délai de prescription pour la faute inexcusable :
En général, les droits des victimes pour obtenir des indemnités sont soumis à un délai de prescription de deux ans (article L431-2 du Code de la Sécurité Sociale) qui commence à partir de la date de consolidation des blessures ou de la fin des indemnités journalières.
Ce délai est interrompu si une action pénale est engagée contre l’employeur pour les mêmes faits.
Réparation des préjudices :
En cas de faute inexcusable, la victime peut obtenir une majoration de sa rente, ainsi que la réparation des souffrances endurées, du préjudice esthétique, du préjudice d’agrément, et du préjudice professionnel.
En cas de décès, les ayants-droits peuvent demander réparation pour le préjudice moral (article L 452-3 du Code de la Sécurité Sociale). La réparation est versée directement aux victimes par la Caisse, qui récupère ensuite le montant auprès de l’employeur.
Délai de prescription pour l’action récursoire de la Caisse :
Selon un arrêt de la Cour de Cassation du 10/11/2021, l’action récursoire de la Caisse contre l’employeur se prescrit par le délai de droit commun de cinq ans (article 2224 du Code Civil).
Ce même délai s'applique pour l'action contre l’assureur de l’employeur..
Compte tenu de la complexité des démarches et de l'importance d'optimiser l'indemnisation, il est recommandé de se faire accompagner par un avocat compétent dans la défense des droits des victimes d’accidents du travail, comme le Cabinet CWK AVOCATS